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mis en ligne à titre militant par des adhérents de la CNT-AIT, chômeurs
ou salariés, après leur journée de travail.
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Fonction Publique :
Le 22 mars n'est plus ce qu'il était !
Le 22 mars dernier, la fonction publique a connu une nouvelle journée
de grève lancée par les syndicats institutionnels. Cette
grôve n'a pas connu le même succès que celle du 30
mars. Occasion nous est donnée de réfléchir sur le
syndicalisme dans la fonction publique.
De qui se moque-t-on?
Les travailleurs de la fonction publique de la CNT à Pau ont eu
le plus grand mal à se décider : faut-il donc faire la grève
ou non? Par delà les revendications dont certaines sont contestables
- nous y reviendrons, le problème réside encore et toujours
au niveau ou se prennent les décisions.
Cette grève est l'exemple même de la nocivité du fonctionnement
syndical habituel. Des bureaux nationaux décident d'appeler à
la grève par le biais d'une intersyndicale où se déroulent
toutes les tractations. Elle a bon dos l'intersyndicale, chaque syndicat
peut retourner contre elle la responsabilité d'un slogan trop réducteur,
d'une action trop tardive etc. Dans les faits voilà ce-qui se passe
: le fonctionnaire lambda apprend qu'il faut faire grève, voilà
le type d'action, voilà le jour, voilà les revendications.
Puis il rentre chez lui. Parfois, un article dans un journal syndical
fait allusion aux négociations qui se font loin de lui. Et encore,
on le met au courant pour la forme et de façon partielle. A aucun
moment il ne sera demandé son avis à la base l'ensemble
des grévistes. D'ailleurs les assemblées générales
ne sont pas pratique courante. Lorsqu'il en existe une, cela ressemble
plus à un lieu de débat consultatif où les syndicats
prennent note. Pas d'assemblée pour décider de la grève
et des revendications, des négociateurs d'office qui ne rendent
pas compte, et des actions - pour celle du 22 mars en tout cas - qui ne
sont pas guidées par l'efficacité militante.
Généralement la CNT de Pau participe de façon critique
à la lutte : pourquoi ? Parce que nous nous positionnons avant
tout en fonction de ce que tentent les ministères. Et l'on connaît
les attaques incessantes contre la fonction publique, classe de privilégiés,
nous y reviendrons aussi. Alors mieux vaut un minimum de combativité
que pas de combativité du tout.
Sauf que parfois certaines luttes sont démoralisantes et donc nocives.
La grève du 22 mars fait figure de provocation et de symbole :
celui de directions syndicales à la solde des intérêts
politiques de la gauche plurielle. Comment accepter l'arrêt du mouvement
en janvier qui bénéficiait d'une forte mobilisation (qui
rappelait 1995) pour ne le reprendre qu'après les élections,
deux mois plus tard, quand la sauce est retombée ? On nous rétorque
qu'il est difficile de s'entendre dans l'intersyndicale, la belle affaire
! On nous présente celle-ci comme un outil d'unité et d~efficacité
dans l'action : en voilà une belle démonstration.
Le débat prend alors cette forme: doit-on refuser de cautionner
un tel sabordage et, du même coup, les désillusions qu'il
entraîne, sans oublier les forces que l'on perd dans ces grèves
d'un jour, éparpillées tout au long de l'année et
que l'on ne peut contrôler; doit-on au contraire participer de façon
critique pour montrer malgré tout qu'il existe une force de résistance
dans la fonction publique et aller à l'encontre des éléments
les plus combatifs qui ont souvent fait grève? Il faut alors être
critique et extrêmement clair sur la signification de notre participation.
Le débat n'est pas clos à la CNT de Pau, et, pour ma part,
je ne suis pas très sûr de la marche à suivre. Nous
avons choisi la seconde solution sans enthousiasme et plus par confort
moral que par conviction : nous nous sentons plus à notre place
au milieu des grévistes que des non grévistes. Reste le
goût amer d'être manipulé et d'agir plus pour la forme
qu'avec la conviction que l'on va aboutir. D'autant que les revendications
du mouvement sont loin d'être satisfaisantes.
Le danger de l'isolement de la fonction publique.
Il n'y a pas que Madelin pour dire que les fonctionnaires sont des privilégiés.
Le sentiment est partagé par une large part de l'opinion.
L'enjeu pour le pouvoir est simple: on isole la fonction publique, un
des secteurs traditionnels des luttes, et l'on prépare ainsi les
grandes "réformes" c'est à dire l'alignement sur
les objectifs de l'Organisation Mondiale du Commerce qui demande à
ce que l'ensemble des services soient privés et soumis aux lois
générales du marché mondial.
Et force est d'avouer que le discours passe même chez les personnes
les plus hostiles au système. On ne peut se contenter de l'expliquer
par la désinformation et le discours ambiant que l'on nous impose.
Certes il est aberrant de considérer les fonctionnaire comme des
privilégiés. Il suffit de rappeler quelques chiffres : en
taxant sur leur patrimoine en bourse les 50 français les plus riches,
l'on aurait suffisamment d'argent pour attribuer une allocation de 10
000 francs par mois à tous les chômeurs. Les 3 hommes les
plus riches de la planète ont plus d'argent que les 43 pays les
plus pauvres, etc... Même avec des raisonnement réformistes
de ce style et sans parler d'une redistribution égalitaires des
richesses, l'argument ne tient pas. Les fonctionnaires, dans leur immense
majorité, je ne parle pas des quelques énarques et hauts
fonctionnaires de l'administration centrale mais de ceux qui travaillent
dans les services publics, ne vivent pas sur le dos des gens. J'ajoute
qu'il ne faudrait pas oublier que toutes les garanties obtenues dans la
fonction publique l'ont été par la lutte. Mais il est important
de comprendre sur quoi repose cette hostilité récurrente.
Les grèves de la fonction publique reposent la plupart du temps
sur la défense des salaires. Ce sont des grèves à
forte connotations corporatistes et elles sont prises comme tel. Les fonctionnaires
sont perçus comme des égoïstes qui ne bougent que pour
défendre leur bifteck. Ce sentiment interdit tout débat.
Et combien de fois, ces derniers temps, n'ai-je pu expliquer que l'indexation
des salaires n'était pas une bataille pour l'augmentation des salaires
mais une bataille pour qu'ils ne baissent pas en valeur effective. M'écoute-t-on
lorsque je rappelle que les catégories C de la Fonction Publique
ne gagnent pas le SMIC et qu'il est logique de se battre pour eux ? Difficile
même de faire comprendre parfois que la grève des retraites
était une grève en solidarité avec le privé,
pour le retour aux 37,5 annuités, et non une "manif de fonctionnaires".
Certaines revendications de la Fonction Publique sont légitimes,
d'autres ne le sont pas. Je parle en tout premier lieu des négociations
sur les points qui reviennent à accroître les inégalités
salariales. Mais plus que tout, ce qui est contestable c'est le comportement
traditionnel qui existe dans la fonction publique. Il faut avoir le sens
des priorités Si l'on veut être crédible. Le problème
de la précarité dans la fonction publique est un problème
éthique et annonçant la disparition du statut de fonctionnaire.
Les revendications la concernant sont pourtant toujours à la traîne,
perdues dans une longue liste qui fait plus figure de faire valoir que
d'axe de lutte. A quand des vastes campagnes d'information, de réflexion
et de lutte
sur ce sujet ? L'image des fonctionnaires en lutte serait changée
car ils agiraient réellement sur un des problèmes majeurs
de société tout en revenant à ce qui fait l'essence
du syndicalisme : la solidarité. Je sais que des actions ont été
menées mais elles semblent noyées dans la masse. Elles ne
font pas figure - et pour cause - de priorités. Si les fonctionnaires
sont pris pour des égoïstes c'est que bien souvent, les luttes
qu'ils mènent sont fortement corporatistes. Cette dérive
n'est ni défendable, ni justifiable, ni fiable. L'isolement relatif
que j'ai pu observer autour de cette grève du 22 mars a le goût
amer du fruit de récoltes mal semées.
Une action syndicale qui ne doit pas se limiter aux mouvements
de grève.
Au terme de ces constats, quelques axes s'imposent. Nous devons intensifier
la propagation de nos critiques et de notre discours au sein de la fonction
publique pour faire évoluer la réflexion avant même
les mouvements de lutte et à leur suite aussi car il est trop facile
de "tirer un trait" et de passer à autre chose sans bilan
En premier lieu, on ne peut accepter le fonctionnement de lutte actuel.
Il est primordial d'apporter une critique sévère d'autant
plus facile que les faits en imposent l'évidence. Cette critique
doit s'appuyer sur l'alternative d'un fonctionnement autogestionnaire
des luttes avec les principes d'assemblée générale
souveraine, de délégués élus, mandatés
et révocables, ainsi que du contrôle des négociations
par la base. La position ultra minoritaire que nous occupons aujourd'hui
nous impose de redoubler d'intensité à ce niveau et de commencer
par installer des assemblées générales au niveau
local.
Dans le même temps, nous devons adopter une attitude ferme contre
les dérives corporatistes et demander à ce que la lutte
contre la précarité soit une priorité. Nous devons
inciter, dès que possible, à toutes les actions de solidarité
avec le privé. il ne s'agit pas d'une stratégie mais d'un
problème éthique et politique. Il s'agit de retrouver l'esprit
du syndicalisme et de revenir à un syndicalisme de combat et de
solidarité. Notre démarche doit s 'inscrire dans une démarche
plus générale où le syndicalisme ne se comporte ni
en cinquième roue de la charrette aux ordres des partis politiques,
ni en simple agence de défense d'intérêts catégoriels
pour avoir l'ambition de s'intéresser à l'ensemble des problèmes
de société et redéfinir une utopie porteuse d'un
projet de société différent, seule capable d'être
le moteur de ces solidarités. Il est essentiel que le travail de
fond diffusé sur nos lieux de travail aille dans le sens de cet
objectif prioritaire.
Jipé.
Article paru dans Le Combat Syndicaliste n°176
mai-juin 2001
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