Actualité de l’Anarcho-syndicalisme

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SERBIE : Elections présidentielles, victoires des abstentionnistes

Monday 4 November 2002

Le 5 octobre 2000, un soulèvement populaire en Serbie avait chassé Milosevic du pouvoir. Peu après, dans un texte qui relatait cette lutte, les anarcho-syndicalistes de Belgrade parlaient de " révolution confisquée ". Le nationaliste Vojislav Kostunica est devenu le président des restes de la république fédérale de Yougoslavie, les maîtres ont changé, une démocratie bourgeoise a été instituée, mais, pour les classes populaires, rien n’a changé, si ce n’est que leurs conditions de vie et de travail n’ont cessé de se dégrader. Au niveau de la politique intérieure, ces deux années ont vu s’affronter Kostunica et le Premier ministre serbe, Zoran Djindjic, réformateur libéral pro-occidental. Il faut dire que ce combat entre ces deux hommes n’était qu’une lutte pour le pouvoir. Au niveau économique, ni l’un ni l’autre, ne remettait en cause les privatisations, même si Djindjic pouvait sembler plus pressé d’établir des réformes conformes à l’économie de marché mondiale. Peu avant les élections, Kostunica, lui, promettait des actions aux employés des entreprises privatisées. Une promesse électorale qui, bien sûr, n’engage que ceux qui y croient. Et personne, ou presque, ne pouvait y croire en Serbie.

Pour le premier tour des élections présidentielles serbes, ils étaient onze candidats à se présenter. En plus de Kostunica et Miroljub Labus (le candidat soutenu par Zoran Djindjic), il faut nommer le candidat de l’extrême droite ultra-nationaliste, Vojislav Seselj, soutenu par l’ancien dictateur Milosevic. Ne pouvant réellement faire des promesses crédibles pour ce qui est des aspirations sociales des classes populaires, Kostunica s’est lui-même lancé dans une sur-enchère nationaliste. C’est ainsi que pendant la campagne électorale, il a déclaré " provisoire " la séparation entre la Serbie et la Republica Srpska, région de Bosnie-Herzégovine à majorité serbe.

Cette foire électorale sur fond de misère et de crise économique n’a pas passionnée le peuple serbe. Le 29 septembre, pour le premier tour, c’est difficilement que l’on approche des 60% de suffrages exprimés. Kostunica arrive en tête avec 31,2% des voix, suivi de Labus qui obtient 27,7%, et Seselj qui arrive troisième avec 22,5%. Les neuf autres candidats se disputent les bulletins restant, aucun d’entre eux n’atteignant les 5%. L’Union Européenne, malgré le faible taux de participation, se félicite du scrutin : le futur président serbe sera de toute façon un homme issu d’une des cliques au pouvoir depuis octobre 2000.

Dimanche 13 octobre, jour du deuxième tour, tout semble joué d’avance. Et pourtant ! Ni Labus ni Kostunica ne sortent vainqueur de cette élection : L’abstention est telle, même pas un électeur sur deux qui se rend aux urnes, que personne n’est élu président de Serbie. Les médias et les politologues débattent pour savoir quelle sera la date des prochaines élections. En tout cas, le message du peuple serbe est clair : après s’être battu pour chasser le dictateur nationaliste Milosevic, il est, après à peine deux ans, déjà dégoutté par la démocratie bourgeoise libérale. Dans un cas comme dans l’autre, le prolétariat de Serbie n’a connu que toujours plus de misère et de privations. Il reste à souhaiter que ce rejet des politiciens, qu’ils soient nationalistes ou libéraux, se transforme en lutte globale contre l’exploitation. La révolution d’octobre 2000, confisquée par les politiciens, n’a peut-être pas dit son dernier mot. Quoiqu’il en soit, cette situation rend d’autant plus nécessaire le soutien aux forces authentiquement révolutionnaires de Serbie, comme l’I.A.S. (Initiative pour des Anarcho-Syndicats) qui, après avoir mené une campagne pour l’abstention dès le premier tour, s’apprête à organiser son congrès fondateur.


Déclaration de l’I.A.S.


Voici le communiqué de presse que l’Initiative pour des Anarcho-Syndicats (IAS), organisation anarcho-syndicaliste de Serbie, a transmis aux médias pour commenter l’échec des élections présidentielles. L’échec vient du fait qu’il n’y a pas eut assez de votants. L’IAS avait lancé, il y a quelques semaines, une campagne anti-électorale à travers toute la Serbie.

L’Initiative pour des Anarcho-Syndicats (IAS) salue tous les travailleurs qui ont vu juste à travers l’hypocrisie et le caractère artificiel du système et ont refusé de participer au spectacle appelé " élections ".

Depuis des siècles, nos maîtres nous enseignent d’obéir et de remplir les " devoirs " qu’ils nous imposent, notre " devoir citoyen " ne vise qu’à légitimer le vol des fruits de notre travail. Bien sur, il y a des gens qui boycottent les élections pour d’autres raisons, mais il est certain qu’un nombre croissant de gens en ont assez des politiques dont le seul but est de nous dominer. Nationalistes et libéraux ne sont que les deux faces d’une même pièce ; l’échec des élection apporte un message clair. Nous ne voulons pas être soumis, nous ne voulons pas de l’hypocrisie et des promesses cherchant à vendre bon marché une politique opportuniste.

Les futures élections imposées démontreront que la volonté des ouvriers n’est pas respectée, des travailleurs qui ont clairement dit qu’ils ne voulaient pas être une partie du spectacle, des travailleurs qui reconnaissent que le choix qu’on leur offre n’est pas un choix, parce qu’on ne peut pas choisir entre deux maux. Alors que l’économie capitaliste tue et détruit tout ce qui est humain en nous, les Etats nous enferment, nous matraquent, nous marginalisent, nous oppriment et nous répriment afin de protéger les intérêts des capitalistes. On ne peut réformer ce système. Ce système doit être détruit et tous les protagonistes de l’injustice devront répondre de leurs actes pour avoir permis et instauré l’économie inhumaine et le nationalisme. Que l’on nous offre telle ou telle personne comme " président ", " représentant " ou " expert ", cela ne change rien pour nous, tous sont les serviteurs d’un système que nous voulons détruire, et ce que nous devons faire est de refuser de voter.

Qu’en est-il des bas salaires ? Qu’en est-il des ouvriers licenciés et exclus ? Nous n’allons pas sombrer dans le jeu politique et les élections, nous voyons clairement ce que signifie ce jeu et nous refusons d’attendre au garde-à-vous comme des esclaves et des serviteurs. Que les politiciens locaux apprécient ou pas, nous disons clairement : ne jouez pas avec notre volonté et nos vies, nous avons refusé d’aller voter mais ce n’est que la première étape. Ce n’est pas un boycott à l’encontre de quelques partis politiques, mais un boycott de l’ensemble de ce système malade et artificiel !

Vous pouvez, une fois encore, appeler à de nouvelles élections, et ne pas prendre en compte que nous diront encore une fois " non ", mais soyez certains que notre heure arrive. Nous allons combattre et faire feu sur tous les partis politiques, politiciens et capitalistes. Notre heure arrive !

A mort l’Etat et le capitalisme !
Vive la liberté !

I.A.S
Inicijativa za Anarho-Sindikat
inicijativa@inicijativa.org

Article publié dans HOBOCTb n° 8
Contact : HOBOCTb c/o CESL BP 121 25014 Besançon Cedex
solidarite@club-russie.net


CNT-AIT



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