Actualité de l’Anarcho-syndicalisme

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Paysans, disparition programmée

mercredi 1er octobre 2003

Sous couvert de défense de la Santé publique, la politique sanitaire européenne organise la disparition des petits paysans.

1° Les différents managers de la Société France and Cie, qui se sont succédés au fauteuil directorial depuis les années 80 ont eu pour unique objectif la préparation du grand bond en avant vers la mondialisation de l’économie pour préparer l’avènement de l’empire planétaire de la marchandise, nos joyeux managers ont procédé à de vastes restructurations (dans différents secteurs) toutes fondées sur le principe supérieur : "la concentration favoriseras, la chienlit élimineras".

L’agriculture ne pouvait échapper indéfiniment au commandement N° 1 de la nouvelle table. Largement entamée depuis les années 40-50, l’autonomie paysanne (rappelons que les paysans ont vécu de façon quasi autarcique pendant des siècles) a été mise à mal. S’il est vrai que la "nature a horreur du vide", comme le disait fort justement Blaise Pascal, il est indéniable que le capital ne peut tolérer des comportements autonomes.

2° En deux générations, le paysan est devenu exploitant agricole, puis agro-manager.

Dépossédé de son savoir-faire par une foultitude de spécialistes et de conseillers, perverti dans sa relation à la terre et aux animaux, le paysan a perdu son identité, sa culture et une certaine liberté. Surendetté, hypothéqué jusqu’à la fin de ses jours, il est devenu le salarié à domicile du Crédit Agricole qui peut le mettre sur la paille du jour au lendemain.

Pour échapper ou tenter d’échapper à un système productiviste, à l’intensification et à l’absurde course au profit, génératrice de pollution, une minorité de paysans de souche ou néo-ruraux- ont essayé de s’aménager un espace de ’liberté relative" dans le système agricole dominant.

Plutôt que de vendre leur lait ou leur viande, leurs légumes ou fromages, à des trusts spécialisés (... dans l’exploitation du travail surtout), ces minoritaires ont choisi la vente directe de leurs produits au consommateur Il ne s’agit pas ici bien sûr d’établir des équations hâtives et hasardeuses (ou des contre-sens) entre vente directe et action directe : il va de soi que tout mode commercial d’échange restera à jamais suspect pour notre projet anarcho-syndicaliste. Cependant, et puisqu’il faut bien vivre, d’aucuns avaient donc choisi de produire, de transformer et de vendre directement, trouvant que ’l’autogestion" de leur travail engendrait moins de frustration et d’aliénation qu’un autre mode de vie.

Cette relative marge de manoeuvre, ce frêle espace de liberté dans le système, s’est avéré malgré tout suffisamment gênant pour qu’on cherche à le faire disparaître. La consommation baisse (sept millions de chômeurs et précaires) ; toute part du marché est donc bonne à prendre : les trusts de l’agro-alimentaire, la grande distribution se sont aperçus qu’une part du marché alimentaire leur échappait parce qu’occupée par les "petits producteurs".

Encombrants économiquement parlant, ces petits producteurs, enclins aux jacqueries sans lendemains, sont aussi des imprévisibles politiquement parlant : leur disparition est programmée depuis les années 70, mais ils mettent beaucoup de mauvaise volonté à s’éclipser discrètement !

Survivants aux diverses lois d’orientation agricole (genre restructuration dans l’industrie), il fallait bien trouver l’argument massue, l’arme qui balaierait définitivement la piétaille de l’agriculture : c’est 1’hygiène normative qui devait fournir aux "tenants de la concentration" le moyen imparable pour organiser la sélection :

-  pour pouvoir vendre les produits qu’ils transforment, les petits agriculteurs vont devoir créer des locaux appropriés à la transformation des produits de la ferme ; ces locaux sont conçus suivant des normes d’hygiène imposées à des modes de production industrielle.

Exemple : un éleveur transforme son lait (de vache, de. brebis, de chèvre) en fromage. Il se voit obligé d’améliorer sa fromagerie actuelle et d’ajouter un sas, une salle de travail, une salle d’affinage, une salle d’emballage, une salle de lavage, une salle de vente ...(ambiance bloc opératoire, microphobie à tous les étages).

Le coût de l’opération est évidemment lourd pour un petit agriculteur dont le revenu moyen tourne souvent autour du S.M.I.C.

Nombreux son ceux qui abandonnent, ne pouvant faire face à l’investissement obligatoire, les autres se réendettent, obligés qu’ils sont pour payer leurs nouvelles charges d’augmenter le troupeau, la production. C’est l’engrenage infernal :

-  pour le producteur :.charges de travail (souvent déjà très lourdes en agriculture, journées souvent bien au-delà des "conventions syndicales"), charges financières plus ou moins ingérables ;

-  encombrement de la "filière" suite à une surproduction (pour éponger l’endettement) et, en final, une chute du prix du produit concerné puisque les marchés sont saturés, Et c’est bien là que l’on voulait en venir . . .

La ruine des uns, en agriculture comme ailleurs, nourrit la prospérité des autres.

Plans sociaux, restructurations industrielles, lois d’orientation agricole (hygiènisme draconien avec les petits producteurs, laxisme avec les trafiquants internationaux de vaches folles et de maïs transgénique). Les logiques de sélection et d’élimination se retrouvent et se ressemblent de façon confondante et contondante.

Il eut fallu organiser une résistance collective, mais las, hélas, entre cogestionnaires repus et satisfaits (F.N.S.E.S.A) et cogestionnaires englués dans l’illusion du réformisme, partisans de l’entrisme (Confédération paysanne) tout azimut dans les institutions agricoles, les pourfendeurs de germes fermiers ne trouvèrent point de résistants farouche sur leur chemin. De résistance passive en traînage de pieds pour certains isolés, il n’y a pas eu d’autre solution que la rédition sans gloire, faute de quoi l’on vous fermerait votre boutique.

Mais n’empêche
Ils sentiront un peu
Nom de Dieu
Que la Commune ... (air connu).

Un militant du Quercy-Rouergue.


CNT-AIT



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