Actualité de l’Anarcho-syndicalisme

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PROPRIETAIRE EXPLOITANT AGRICOLE

vendredi 15 août 2008

Toute ma vie, jusqu’à ce jour, j’ai essayé de vivre le plus libre possible, c’est-à-dire de profiter un maximum du temps qui m’est offert pour jouir de la vie, échapper aux contraintes, mettre à profit mon temps libre pour voyager, faire des rencontres, lire, m’instruire, m’épanouir, rêver, vivre humblement, m’émerveiller devant la beauté du monde, idéaliser une autre société, humaine juste, juste humaine, libre, ou règnerait partout la souveraineté de la vie, tout en essayant à mon niveau de diffuser cet idéal, ses idées et ses pratiques pour construire un autre futur.

Mais, ah oui ! il y a un MAIS : il faut bien manger pour vivre ou plutôt "survivre" car "la vie réduite à ses impératifs économiques peut être considérée comme de la survie".

Les difficultés du moment (problème financier : petit problème financier mais grande pression de ma banque) m’obligent à aller vendre ma force de travail pour subvenir à mes besoins comme la très grande majorité de mes semblables. Contrainte suprême : se vendre au premier venu pour pallier au plus vite ma crise budgétaire et éviter complications et naufrage.

Pas trop de problèmes pour moi, je me branche sur le site de l’ANPE (internet), je consulte les offres ; travail à la campagne, dans un petit village du Tarn & Garonne : ça me va, un bol d’air me fera le plus grand bien. Boulot : cueillette de fruits et légumes de saison. Je suis fils de paysan. Cela ne demande pas beaucoup de compétences, ça fera bien l’affaire pour sortir la tête de l’eau.

Prise de contact par téléphone avec l’exploiteur (l’exploitant agricole), rendez-vous est pris pour entretien le lundi. Conditions de travail de mon "brave patron" 40 heures par semaine, moitié déclaré, moitié au "black" (non déclaré) pas de pause au travail, pas de cigarette, pas de portable (autorisé toutefois en cas de force majeure), pas de repas à midi, ni de panier, disponibilité pour les week-ends, présence sur le lieu de travail à 7H45. Bon ça me va, j’ai pas envie de discuter et j’ai surtout besoin de fric en urgence. J’ai un J9 aménagé sommairement en camping car qui me permet de rester sur place ou à proximité, ce qui m’évite trop de route.

Première semaine de travail cueillette cerises et fraises en "hors sol", 3 jours non déclarés et première tension. Je n’aime pas du tout une certaine façon de parler aux gens, je ressens beaucoup de mépris, je ramasse pas assez vite, la patronne me dit : "Mets toi la, à côté, si t’avances pas je vais te mettre des coups de pieds dans le cul". Je me dis que c’est peut être de l’humour noir, 10 mn plus tard je suis très légèrement en retard sur les autres, je n’ai pas l’habitude de cueillir des fraises mais il me semble que j’apprends vite. Lui, le patron : "Qu’est ce que tu fais, tu dors ?". Moi : "Non, non, je ramasse des fraises".

L’après midi cueillette cerises, ça continue, des remarques déplacées, une pression permanente, question de rentabilité. Je suis en train de cueillir mes cerises sur mon échelle, je les entends parler tout les deux (patron, patronne) "T’as vu ? T’as vu ? ", "Ça va pas ! je sais", "Non ! mais il faut le mettre au pli". J’entends, je ne dis rien, mais je pense "Quelle bande de c... de patrons de m...".

Au bout du 3ème jour, je me dis qu’il est possible que ce soit le dernier, je suis stressé par tant de pression, énervé par tant de mépris et écœuré par une telle mentalité d’arrivistes sans scrupule prêts à marcher sur la gueule des gens pour arriver à leurs fins. Fin de journée : ils doivent me régler mes 3 jours de boulot, je décide de faire une mise au point sérieuse avec eux sur leur façon d’être et de parler aux gens. Je leur fais part donc des critiques acerbes qu’ils m’ont adressées. "Il faut accepter les critiques" me dit-il ; "J’accepte les critiques si toutefois elles sont pertinentes, mais il faut me parler correctement" lui dis-je. "Tu sais, ils y en a qui sont restés qu’une matinée" se vante t’il.

Bon je comprends trop, on en reste là pour l’instant, mais je suis assez remonté et un profond dégoût m’envahit à me donner des effets vomitifs devant tant de bêtise humaine, trop humaine. La semaine suivante se passe plutôt bien, le ton a changé un tant soit peu, mais certaines remarques et discussions (paroles) me déplaisent fortement. Nous sommes trois employés, je sens bien quelques propos racistes surtout de la part de mes exploiteurs, un peu de sexisme, des grossièretés de cul, blagues (nases) nulles où ils se pensent libres sexuellement, mais à voir.

Le patron s’adresse à une employée : "Tu sais que l’année dernière on gagnait tout juste que 50 centimes d’euro par ouvrier ?". Oh la ! Je n’ose lui demander des précisions, si c’est à la minute ou à la seconde ?

Fin de la 2ème semaine je reçois des félicitations de mon chef (patron) pour mon travail. "Tu sais, on est content de toi, continues comme ça, tout ira bien et on n’a pas l’habitude de le dire". Je donne un doux merci hypocrite ; bien sur un bon petit esclave, gentil obéissant, qui fait bien son travail et qui rapporte de l’argent un max à son patron pour contribuer à augmenter son capital ; je comprends trop bien, je ne suis pas naïf et pas débile non plus. Finalement je suis embauché pour 4 mois, mais je me connais trop, je partirai avant c’est sûr.

Travailler plus pour engraisser un patron : non merci !!! je préfère travailler moins pour vivre plus.

Pauvres paysans exploités de toujours mais exploiteurs aussi.

Zorro


CNT-AIT



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