Actualité de l’Anarcho-syndicalisme

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Conditions de travail
Informatique : Un secteur de ... pointe ?

Article du C.S. n° 177 - Juillet/août 2001

samedi 15 juin 2002

L’informatique est depuis 20 ans de plus en plus présente dans nos vies. Que ce soit au boulot, à la maison, aussi bien que dans nos nies, et dans notre culture (publicité, cinéma, musique, littérature, jeux vidéo...). Il est certainement un des secteurs de "pointe" de l’organisation actuelle du travail. Et en tant que tel, il partage généreusement les mêmes "désavantages (dés-acquis) sociaux" que les autres secteurs. Une des raisons de cette situation vient en bonne partie du fait que ce secteur d’activité est récent, qu’il s’est d’autant intégré aux entreprises qu’aux habitudes de consommation ; il est donc très médiatisé et en forte expansion dans la société, que ce soit à un niveau économique ou à un niveau social. Pour comprendre cet "emballement" du capital pour l’informatique, il suffit de comprendre que l’objectif premier de cet outil est d’augmenter la productivité, d’automatiser les tâches ; bref, on en déduit rapidement son pendant : l’augmentation de la plus-value.

J’ai pu observer ce phénomène personnellement de façon flagrante quand j’ai dû m’occuper de l’informatisation des postes de secrétariat de Philips composants à Dreux. L’informatisation de ces postes s’est automatiquement matérialisé en une demande de productivité plus importante (plus de documents à réaliser, plus d’exigence pour la mise en page, et une multiplication des domaines d’activités). Dans un même temps l’acceptation de cette augmentation de cadences passait par la mise à disposition d’un outil à l’aspect "moderne" et personnalisé. et tout ceci "bien sûr" sans gain de salaire. Très rapidement une secrétaire m’expliqua que bizarrement malgré "que c’ était vachement chouette l’outil informatique", elle avait l’impression d’en faire encore plus qu’avant. Dans un même temps beaucoup d’autres secrétaires ressentaient une culpabilité par manque de compétences dans l’utilisation de ces nouveaux outils, et acceptaient volontairement l’augmentation d’heures sup. non rémunérées, afin de toujours répondre à la demande de productivité croissante.

Ce phénomène d’acceptation est tout aussi intégré par les travailleurs du secteur. En effet, ce secteur fait appel sans cesse à de nouvelles compétences. Tout travailleur peut en peu de temps se former à un nouveau métier ou sur un nouvel outil ; la perspective est motivante, et valorisante (mais valorisante pour qui !). Les compétences doivent être acquises par l’ouvrier (celui qui oeuvre) sans perte de productivité. Le résultat est évident, un secteur composé d’assimilés cadres (flexibilité horaire), de freelances (travailleurs indépendants, qui se forment sans salaire entre 2 contrats) ou de stagiaires (sans salaire)... Et quand ce sont des contrats plus ou moins déterminés, c’est généralement pour des sociétés de service (SSII), qui vendent les travailleurs comme on vend de la viande. Mais "c’est vachement bien l’outil informatique"... Combien de fois, j’ai entendu des gens autour de moi m’expliquer qu’ils étaient fiers de travailler pour une starteupeu, même si pour l’un c’était un stage de 6 mois non rémunéré à l’autre bout de la France, pour l’autre du travail au black payé en belles promesses, pour un troisième payé dans 5 ans si la boîte ne coule pas, et pour beaucoup d’autres payé avec des médailles en chocolat (genre ’je suis un collaborateur, je suis un cadre, je fais des choses super importantes, je suis un RES-PON-SA-BLE").

De plus, comme tout secteur émergent, il est en parfaite synchronisation avec l’organisation actuelle du travail, un instantané des méthodes d’exploitation du capital. Les contrats sont individualisés, les salaires sont composés de primes, de plans d’épargne entreprise, d’actions... Il n’existe aucune référence à des luttes passées, ni aucune organisation des travailleurs entre eux, et un taux de syndicalisation dérisoire (par exemple, quand je travaillais pour Steria infogérance, plus de 300 salariés, il n’y avait qu’une seule autre personne syndiquée... la directrice des ressources humaines ! Syndiquée CSL évidemment !!). Il en résulte une négociation calamiteuse sur les 35 heures où l’annualisation devient une revendication (devrais-je dire un espoir inavoué ?) afin d’obtenir deux ou trois jours de congé par an, en compensation des innombrables vexations dues à la flexibilité.

.Et les patrons voudraient nous faire croire, que tout ceci n’est pas grave, le secteur étant en pleine expansion ; on serait des explorateurs modernes de terres inconnues (salariés sans salaires), des créateurs (de vitrines commerciales virtuelles) ; nous maîtriserions des super méga hautes technologies (qu’on a apprises pendant 2 semaines le soir après le boulot) ; nos salaires seraient au-dessus des moyennes d’autres secteurs (non ! Pas à l’heure, au mois !), et les carrières fulgurantes... surtout pour ceux qui ne suivent pas la cadence. Le patronat se frotte les mains, les nouveaux travailleurs arrivant sur le marché de l’informatique étant toujours plus nombreux, il prend tous les volontaires, pour alimenter l’appétit glouton du productivisme capitaliste...

Ah ! C’est certain, pour les travailleurs, l’informatique est vraiment un secteur de.. merde !

Stéphane, Syndicat Interco Marseille


CNT-AIT



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