Actualité de l’Anarcho-syndicalisme

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Le quotidien des personnels de soins

jeudi 30 octobre 2003

Jeudi ... août, dans une clinique. Six heures trente. "Debout, debout, monsieur, on se réveille, c’est le matin !"

Deux aide-soignantes pour le réveil.

Une pour le bras droit et une pour le bras gauche. Speed. Prise de pouls à droite, prise de tension à gauche, prise de température à l’oreille. Agrémenté de sourires. Speed. Et tout en me donnant les cachets à prendre pour la journée. Ayant, en expertes de l’observation vu l’intérêt qu je portais à tout cela, elles s’excusent de la rapidité de leurs gestes en me disant : "Douze heures par jour. On est obligé de minuter notre travail, il faudrait plus de personnel."

L’arrivée imminente du petit déjeuner met fin à notre discussion. Après s’être souhaité une bonne journée malgré tout. Porté par un "bonjour" et un grand sourire, effectivement, voilà le petit déjeuner.

"Un peu de café ?"

"Oui, je veux bien, si vous avez le temps, justement, nous parlions avec vos collègues du temps et de vos conditions de travail."

"Ah ! Mais moi, je ne suis qu’agent de service hospitalier, elles, elles sont aide-soignantes. Mais c’est vrai que ça devient de plus en plus dur de travailler dans les conditions actuelles pour nous toutes. Nous manquons de personnel. Nous sommes des bouche-trous. Mais je vais prendre le temps de discuter avec vous, si le sujet vous intéresse."

"Si vous voulez bien. Par contre je dois vous dire que cela m’intéresse de l’écrire sous forme d’article pour pouvoir le publier dans un bulletin qui traite du social, de l’éducation et de la santé auquel je participe."

"O.K., pas de problème, ça me va, et nous aimerions par contre que vous nous le fassiez parvenir".

Nous l’appellerons Nadia. "J’ai trente-huit ans, cela fait deux ans que je fais ce métier. Je distribue les plateaux-repas, je fais le nettoyage des chambres en plus de mon travail initial qui est d’entretenir les locaux administratifs au rez-de-chaussée. Comme nous manquons de personnel, je travaille aussi dans les étages. Les journées de douze heures sont de plus en plus fréquentes et je suis à trente-cinq heures par semaine. On accueille jusqu’à vingt et un patients quand le service est plein. Quand j’ai fini le nettoyage quotidien des chambres, je dois, entre la sortie d’un patient et l’entrée d’un autre, faire la chambre à fond avec les conditions requises d’hygiène à assurer. Il y a des jours où je fais une quinzaine de chambres en plus du ménage et du nettoyage normal de toutes les autres chambres. C’est de plus en plus pénible, des fois, les sorties et les entrées se bousculent. J’aime mon travail, mais cela devient vraiment dingue. Je suis seule et il faudrait être deux en permanence pour l’étage. Nous sommes souvent au contact et à l’écoute des malades, mais cela ne nous est pas reconnu. Il est fait des différences entre les personnels, il y a des barrières entre nous, personnel ASH, et le personnel soignant ou aide-soignant, alors que nous assurons tous notre travail dans des conditions de plus en plus pénibles et dégradées. Heureusement, entre collègues d’un autre étage on se donne un coup de main. On s’entraide, même pendant les pauses, on aide quelqu’un d’autre. Il faut faire jouer la solidarité en attendant de pouvoir obtenir d’autres conditions de travail, mais c’est vrai que cela devient de plus en plus difficile. Pour nous et pour les malades. Ce qui est pesant, c’est le fait d’en arriver à faire aussi son travail comme un robot. Avec de moins en moins de place pour l’écoute et l’échange avec le malade. Pourtant, les gens sont en demande, certains se rendent compte de la politique de casse qui est mise en place et accentue la dégradation des services de santé, contrairement aux beaux discours diffusés par les médias et les hommes politiques. La droite, la gauche, c’est du pareil. C’est toujours nous, petites gens, qui en pâtissons.

Par rapport à ce qui vient de se passer avec la chaleur, tout ce gâchis soi-disant à cause de la canicule, c’est dur à croire. Mais je voudrais aussi ajouter que chez nous, au Maghreb, mettre les personnes âgées en maison de retraite, ça n’existe pas, la famille reste ensemble. Partir à la mer en laissant seul le papy ou la mamie, je ne connaissais pas cela. C’est fou, tous ces gens morts dans la solitude et l’abandon, alors qu’ici quand même, avec les moyens que normalement il y a pour la santé, tout le monde devrait bénéficier des soins. Rien n’est fait par ceux qui gouvernent, cette société est inhumaine. C’est révoltant".

JP


CNT-AIT



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