Actualité de l’Anarcho-syndicalisme

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POUR UNE VRAIE LANGUE INTERNATIONALE

dimanche 21 octobre 2001

Le fait que chacun puisse, quelles que soient sa langue maternelle et ses facultés, comprendre et se faire comprendre de tous serait un progrès indéniable. Pourtant s’il est facile d’admettre la nécessité d’une langue commune a l’humanité, on ne voit pas la situation évoluer de façon satisfaisante - quoi qu’en disent les défenseurs de l’anglais.

L ’anglais .. le mythe

L’anglais est l’objet d’un véritable culte. C’est bien de culte qu’il faut parler quand on voit des gens soutenir mordicus qu’il est la langue internationale... alors qu’ils sont incapables d’aligner une phrase. Derrière le dogme, quelle est la réalité ?

La majorité d’entre nous n’a presque rien conservé des années passees a ingurgiter l’anglais au collège et au lycée. D’autres, une petite partie, peuvent le lire ou le comprendre avec plus ou moins de facilité, mais rencontrent d’importantes difficultés quand il s’agit de s’exprimen Ceux qui peuvent se vanter de le parler correctement sont une infime minorité (seuls environ 1% de bacheliers sont capables de tenir une conversation de niveau moyen). Le plus dur à avaler est sans doute qu’on nous a fait gaspiller une somme de temps et d’énergie considérable pour arriver à un résultat aussi minable. Enfin, une grande partie de ce qu’on a appris finit par se perdre, car la connaissance d’une langue étrangère fond vite si elle n’est pas entretenue par une pratique régulière. Présenté depuis des décennies par les milieux intello-politico-médiatiques comme la solution à la communication internationale, l’anglais n’est qu’une arnaque. La vrais solution existe : elle s’appelle l’espéranto.

Brève histoire

Le philosophe Descartes fut le premier à concevoir l’idée de "langue universelle fort aisée à apprendre" mais il faudra attendre 1879 pour connaître la première tentative sérieuse de concrétiser cette idée : c’est le Volapük, oeuvre d’un allemand, Johann Martin Schleyer. La langue connaît un succès aussi vif que bref : beaucoup de volapükistes la trouvent encore perfectible et réclament une réforme. Mais Schleyer ne l’entend pas de cette oreille et s’y oppose, revendiquant sa paternité. Ce sera la cause prin cipale de la chute. Déserté, le Volapük tombe en désuétude.

C’est alors qu’en 1887, un oculiste polonais du nom de Ludovik L. Zamenhof fait publier, sous le pseudonyme "dr Espéranto", une brochure jetant les bases d’une nouvelle langue internationale. La langue du dr. Espéranto ("celui qui espère) va vite devenir l’espéranto et se propager. Le mouvement espérantiste se développe en partie sur les ruines du mouvement volapükiste, et on peut noter la forte participation libertaire dès les débuts. En 1905, une étape est marquée : le premier congrès universel espéranto est organisé à Boulognes-sur-Mer. C’est à cette occasion qu’est créé le drapeau du mouvement : il est vert avec une étoile verte dans un rectangle blanc au coin supérieur gauche. Les congrès universels, lieux de rencontres, de débats et d’échanges culturels se succéderont chaque année jusqu’à nos jours (excepté les hiatus pendant les deux guerres mondiales).

Le bilan culturel de l’espéranto est très positif : une littérature originale abondante, avec des romans, des poèmes, du théâtre, etc., et depuis une vingtaine d’années, le développement de la musique, comme l’illustre le Festival Culturel et Artistique d’Espéranto qui a eu lieu l’été dernier à Toulouse (Voir notre journal, N° de mai-juin 2000). Quant à la langue elle-même, Zamenhof a eu l’intelligence d’abandonner ses droits et d’en faire don à la communauté espérantophone. Elle s’est animée de sa propre vie, s’enrichissant considérablement (environ 15000 nouveaux radicaux), évoluant avec l’usage, tout en gardant intactes ses structures fondamentales.

Structure de l’espéranto

Pour prétendre à une utilisation internationale, une langue doit répondre à trois critères principaux : facilité d’apprentissage, pour qu’elle soit accessible à tous, avec le moindre effort ; souplesse, pour qu’elle s’adapte aux modes de pensée de toutes les cultures ; précision, pour permettre une expression fine et nuancée.

La grammaire que Zamenhof a choisie est débarrassée de toute règle inutile et a fortioti de toute exception. Un alphabet phonétique, une prononciation très régulière, pas de genre (féminin ou masculin), pas de conjugaison, etc. La terminaison de chaque mot indique sa nature. Prenons l’exemple du mot parolo (la parole) : le "o " final l’identifie comme étant un substantif (nom commun). En le remplaçant par un "a", on obtient l’adjectif parola (= oral) ; par un "i", le verbe à l’infinitif paroli (= parler) ; par un "e " (è), l’adverbe parole (= oralement). En retenant simplement ces 4 lettres finales, vous savez déjà différencier, dans tout texte espéranto, un adjectif d’un verbe ou dun substantif ! Ce système de dérivation est aussi exploité au moyen d’une quarantaine de préfixes et suffixes qui modifient ou nuancent le sens du mot qu’ils accompagnent. Par exemple, libera signifie "libre". En y ajoutant le suffixe "eco", qui exprime l’idée de qualité, on obtient libereco (= la liberté). Avec le préfixe "mal", qui inverse le sens de la racine, on obtient mallibereco (l’inverse de la liberté, qu’on peut traduire approximativement par servitude). Ou alors, si on y ajoute "ano", on obtient liberecano (littéralement "partisan de la liberté", autrement dit libertaire).

Ce très bref aperçu de la grammaire montre que l’espéranto présente deux avantages : il "économise" la mémoire (aucune irrégularité, une racine permet de construire de multiples mots ... ) et il permet de plier la langue à la pensée, à l’inverse de ce qui se passe souvent avec les langues naturelles (combien de fois avons nous été confrontés à la difficulté d’exprimer nos idées ou nos sentiments avec justesse ?).

Une langue plus européenne qu’internationale ?

En ce qui concerne le vocabulaire, les exemples donnés ont montré qu’il est essentiellement d’origine latine et romane. Mais il est aussi emprunté aux langues germaniques (15 %), slaves (5 %), et à dautres origines (grec, arabe, hébreux ... ). A ce sujet on a souvent reproché à l’espéranto son eurocentrisme, vu comme la marque d’une époque colonialiste. Ceux qui avancent cet argument oublient en général de faire la même remarque à propos de l’anglais, qui est pourtant beaucoup plus fermé et de toute évidence, le corollaire d’un impérialisme économique. Toutefois, la critique est pertinente et mérite qu’on y réponde. Multiplier les sources du vocabulaire et l’ouvrir à des groupes de langues non-européennes est un choix qui se défend, en théorie. Sa concrétisation est une tout autre chose, et le Lojban en est un parfait exemple. Mis au point dans les années 50, le Lojban emprunte son vocabulaire aux six langues les plus parlées dans le monde (chinois, arabe, sanskrit espagnol, anglais et russe). Le résultat n’est absolument pas convainquant car un texte écrit en Lojban est presque totalement opaque, qu’on soit anglais, chinois, etc.

Une forte proportion de la population de la Terre parlant une langue qui est issue du latin ou en a été influencée ; il n’est donc pas incohérent den faire la source principale d’une langue internationale. Remarquons à ce sujet que le mouvement espérantiste japonais est un des plus importants au monde, ce qui montre l’accessibilité de l’espéranto aux personnes parlant des langues asiatiques.

Un échec ?

On présente souvent espéranto comme une relique du passé, une curiosité sans avenir. On ne peut parler d’échec pour tous ceux, de plus en plus nombreux, qui l’apprennent, le pratiquent, et qui par l’utilisation quotidienne et par l’accumulation dun patrimoine culturel impressionnant (traductions de toutes sortes, abondante littérature directement en espéranto -romans, poésie, théâtre-, productions scientifiques ou médicales ... ) démontrent son efficacité. Même si l’espéranto est déjà l’une des langues les plus parlée du monde (elle fait partie des 3 % des langues ayant plus d’un million de locuteurs), elle reste méconnue et marginale. Si on ne peut accuser la langue elle-même, si ses qualités et sa valeur pratique sont indiscutables, comment expliquer cet état de fait ?

Les premiers responsables sont ceux qui, depuis plus d’un siècle, feignent de l’ignorer, ou pire, désinfon-nent et calomnient en entretenant les préjugés, en employant les arguments les plus spécieux. On suggère qu’il aspire à devenir langue unique. On le qualifie péjorativement dartificiel. On le présente comme un simpliste mélange de langues. On proclame que l’anglais est universel. Tel est le discours tenu dans les médias, chez les intellectuels, les politiciens, les cadres économiques. Sûr, que nos élites n’ont pas envie de voir disparaître "leur" anglais, langue internationale des privilégiés ! On répondra que certains d’entre eux se montrent favorables à l’espéranto. L’exemple le plus récent est celui de Jack Lang : à peine ministre de l’éducation nationale, il oublie la question de l’introduction de l’espéranto dans les progammes scolaires, ne serait-ce que sous forme doption. En effet, afficher de la sympathie pour l’espéranto ne coûte rien et permet de soigner son image humaniste (et éventuellement de gagner quelques voix). Mais la classe dominante n’a : jamais été au-delà de quelques déclarations bienveillantes, et a tout fait au contraire pour le discréditer et retarder son développement. Deux explications de ce refus me paraissent importantes .

-  Il y a d’abord la volonté de contrer l’internationalisme. Cest connu : il faut diviser pour affaiblir. En affirmant l’idée de nation, c’est à dire l’idée d’une communauté regroupant sans distinction bourgeois et travailleurs, dont les intérêts dits supérieurs s’opposent à ceux des autres nations, on en vient rapidement à nier l’idée de classes sociales. Sous un aspect plus concret l’enfermement dans des frontières linguistiques est un grave obstacle à la propagation des idées progressistes (et à plus forte raison des idées libertaires), à l’exercice d’une solidarité à l’échelle de la planète. Le pouvoir se sent lus à l’aise face à une population peu éduquée, or, l’espéranto représente un facteur d’élévation culturelle certain ; on peut donc comprendre cette hostilité à une langue internationale.
-  La deuxième explication réside dans la volonté de garder un maximum de contrôle sur l’information. En effet celle-ci circule d’abord entre les mains des grands médias, professionnels et marchands de l’info. C’est leur rôle de choisir, parmi ce qui se passe dans le monde, ce qui "mérite" d’être dit (et donc, ce qui peut être dit ou doit être tu) et comment cela doit être dit. Ils filtrent l’information dans leur intérêts... qui sont les mêmes que ceux de la classe dominante. Il leur serait insupportable de voir se développer une langue favorisant l’information libre et directe, une langue qui permettrait de les court-circuiter d’un bout à l’autre de la Terre

Parce qu’il est un outil d’émancipation, qu’il diffùse les idées d’internationalisme et d’humanisme, nous avons tout intérêt à soutenir l’espéranto en le faisant connaître, en l’apprenant et en le pratiquant. Plus nombreux nous serons à nous en servir, plus le bilinguisme universel parviendra à s’imposer. N’attendons pas que les officiels le fassent à notre place, car nous risquons d’attendre longtemps !

Des espérantistes cénétistes

(Vous Pouvez vous adresser au journal pour recevoir une documentation de base sur l’espéreanto).


CNT-AIT



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