Actualité de l’Anarcho-syndicalisme

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LES DANGERS DE LA BIOMETRIE

jeudi 27 mars 2008

Etre gouverné [ ?]

« C’est être gardé à vue, inspecté, espionné, dirigé, légiféré, réglementé, parqué, endoctriné, prêché, contrôlé, estimé, apprécié, censuré, commandé, par des êtres qui n’ont ni titre ni la science, ni la vertu... Etre gouverné, c’est être, à chaque opération, à chaque transaction, à chaque mouvement, noté, enregistré, recensé, tarifé, timbré, toisé, coté, cotisé, patenté, licencié, autorisé, apostillé, admonesté, empêché, réformé, redressé, corrigé. C’est, sous pretexte d’utilité publique, et au nom de l’intérêt général, être mis à contribution, exercé, ranconné, exploité, monopolisé, concusionné, pressuré, mystifié, volé ; puis, à la moindre réclamation, au premier mot de plainte, réprimé, amendé, vilipendié, vexé, traqué, houspillé, assommé, désarmé, garrotté, emprisonné, fusillé, mitraillé, jugé, condamné, déporté, sacrifié, vendu, trahi, et pour comble, joué, berné, outragé, déshonoré. Voilà le gouvernement, voilà sa justice, voilà sa morale ! »

Pierre Joseph Proudhon (1809-1865), Idée générale de la révolution au XIXe siècle

LA BIOMETRIE

Il existe plusieurs catégories de technologies biométriques, les plus connues étant les analyses biologiques (odeur, sang, salive, urine, ADN...) et morphologiques (empreintes digitales, forme de la main, traits du visage, dessin du réseau veineux de l’œil...). Si certaines d’entre elles font partie de la vielle panoplie des applications utilisées dans le domaine de la sécurité (« pour mieux nous protéger »), d’autres, comme le contrôle biométrique (système automatique de mesure basé sur la reconnaissance de caractéristiques propres à l’individu) ont récemment fait leur apparition dans nos vies. On pourrait se demander pourquoi cette technologie « dernier cri », après avoir été d’abord installée dans des zones dites «  sensibles  » (prisons, aéroports...), s’est ensuite multipliée dans des lieux aussi anodins que l’entrée des cantines scolaires... La réponse est très simple : en 2004, les industriels du secteur, préssentant que leurs technologies juteuses risquaient d’être mal accueillies et de susciter des résistances populaires, ont conseillé au gouvernement de faire accepter la biométrie par le conditionnement des plus jeunes et prescrivaient une «  éducation dès l’école maternelle  ».

Dès 2005, ce lobbying aboutit donc à l’installation progressive de bornes biométriques dans les établissement scolaires pour gérer l’accès des élèves à la cantine, comme dans une école maternelle à Angers ou au lycée de Gif-sur-Yvette, dans l’Essonne (91), parmi tant d’autres. Aujourd’hui, plus de 200 établissements scolaires en seraient déjà équipés... Et ils ne s’arrêteront pas là...

«  BIO-MéTRIE  », c’est-à-dire la mesure de parties du corps (iris de l’œil, empreintes digitales, contour de la main, du visage...) ou de comportements (démarche, manière de signer...) propres à chaque individu. Les parties de mon corps sont numérisées, puis enregistrées dans des bases de données, et réactivées à chaque fois qu’il faut m’identifier. Ce n’est plus ma parole qui compte, la confiance ou le conflit entre humains, mais la vérification systématique de données par une machine. C’est l’ordinateur qui décide, instance supérieure, qui rationalise les décisions humaines selon des protocoles binaires. Plus de négociations possibles, de droit à l’erreur, ni à l’oubli. Tu mets ta main dans une machine, et selon des critères prédéfinis, la porte s’ouvre - ou pas. Ne nous voilons pas la face  : il existe une demande sociale en faveur de ce type de contrôle ; et comme pour le GPS ou les caméras de surveillance, cette demande n’émane malheureusement pas que des flics et des patrons. Nous sommes partout rivés à nos portables, ce qui permet à la police de toujours nous localiser. On peut aussi retracer la journée du citadin moderne grâce à sa carte bleue, son pass Twisto, la consultation de son courrier électronique et, maintenant à Caen, son « V’éol ». La dure réalité est que nous avons déjà accepté dans ses grandes lignes une société de contrôle.

Le contrôle, d’accord, c’est pas nouveau. Mais il change de nature, devient plus vicieux. Si la vue de l’uniforme ne nous est pas particulièrement agréable, nous sommes par contre plus facilement fascinés par la technologie. Quand les technologies de contrôle s’installent à l’entrée des écoles, les lycéens sont déjà habitués  : «  C’est cool, ça fait high tech, c’est comme dans Minority Report, ou 24h.  » Jeux vidéo et films de science-fiction ont bien préparé le terrain.

Le monde de la biométrie est le même que celui du prélèvement massif d’ADN et de la pose de bracelets électroniques sur les nourrissons. Le pouvoir odieux se cache derrière la machine pour endormir la révolte, servir ses impératifs de fichage et de contrôle et nourrir en même temps des intérêts économiques. Tantôt en agitant la peur des terroristes ou la lutte contre la délinquance (à la maternelle...), tantôt simplement par souci de rentabilité, les bureaucraties, petites et grandes, étatiques ou marchandes, ne cessent de soumettre les espaces de la vie commune à leurs propres critères : rien ne doit entraver le flux de l’économie  ; rien ni personne ne doit se déplacer incognito.

Car ce système capitaliste qui prospère sur les inégalités et la misère, c’est aussi lui qui met en place le contrôle et la répression contre la révolte qu’il engendre. Il trouve l’argent nécessaire au développpement du répressif tout en nous disant que les caisses sont vides quand il s’agit de santé, de logement, etc. Pourtant, si les services publics étaient gratuits, il n’y aurait besoin ni de fraude, ni de contrôle (d’ailleurs, le prix demandé aux « usagers » représente bien souvent une faible part du coût réel du service rendu - par exemple, les tickets et abonnnements ne participent qu’à hauteur d’environ un quart au financement des services de transports en commun) ! Quelle légitimité a un système qui, prétendant lutter contre la fraude, préfère surveiller et punir les plus fragiles et qui, parallèlement, honore les délinquants qui nous gouvernent et nous exploitent ? Entre Gautier-Sauvagnac et l’enfant qui ne paie pas sa cantine, où se situe la fraude légitime ?

Depuis 2006 et les « inculpé-e-s » de Gif-sur-Yvette (après la destruction de bornes biométriques dans un lycée) - et dont les textes ont inspiré ce tract - , il est très clair que l’opposition à ces techniques d’identification doit être massive et résolue. Il est nécessaire de soutenir tous ceux et celles qui ont déjà commencé à s’y attaquer, de continuer à réfléchir ensemble pour saisir l’ampleur du problème, de faire jouer notre imagination pour déjouer la Machine.

C’est pourquoi le groupe AIT de Caen participe à une campagne nationale de lutte contre la biométrie. Nos compagnons de Perpignan sont notamment impliqués dans un lycée de leur région où des bornes ont été installées et sont imposées aux élèves. Il est possible de résister, en commençant par refuser ces technologies (ce que la loi permet, mais ce qu’oublient souvent de préciser les proviseurs des lycées...). De plus, comme dans toutes les luttes, la solidarité entre personnes en lutte constitue notre meilleure arme.

Pour mieux nous gouverner, ils veulent nous enregistrer, recenser, surveiller, censurer, etc. ; bref : nous endormir et au besoin nous réprimer. Nous ne voulons ni de leur justice, ni de leur morale.

L’Etat et le Capital ne sont pas neutres : les technologies qu’ils veulent nous imposer non plus !

Refusons la biométrie et les autres formes de flicage.

CNT/AIT
Association Internationale des Travailleurs
BP 2010
14089 Caen cedex
http://cnt.ait.caen.free.fr
cnt.ait.caen@free.fr

Pour en savoir plus :

-  Combattre la biométrie (http://infokiosques.net/imprimersan...)
-  Information et discusion sur la campagne anti-biométrie, sur le forum Rouge & Noir (http://cnt.ait.caen.free.fr/forum/v...)


CNT-AIT



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