Actualité de l’Anarcho-syndicalisme

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À TOUS LES TRAVAILLEURS DE LA PENSEE ET DES BRAS

tract diffusé à Toulouse et Marseille en 1943

dimanche 22 août 2004

Tract « À tous les travailleurs de la pensée et des bras’ » (on reconnaît dans cette appellation l’influence de la Charte de Lyon de la CGT-SR), tiré à Toulouse en 1943 à 5 000 exemplaires, dans l’imprimerie des frères Lyon.

Ce tract a été composé à Marseille par Jean Saulière, alias André Arru, Voline et leurs camarades. Il définit la position politique des anarcho-syndicalistes nous l’Occupation.

FEDERATION INTERNATIONALE SYNDICALISTE REVOLUTIONNAIRE

À TOUS LES TRAVAILLEURS DE LA PENSEE ET DES BRAS

Au moment où l’humanité, dirigée par des fous, des arrivistes et des hypocrites, s’effondre sous les coups répétés des appétits des profiteurs de toutes sortes, nous jetons, une fois de plus, un appel sincère à tous les individus raisonnables et pratiques, pour essayer d’éviter la destruction totale et, profitant du chaos actuel, de les orienter vers une organisation sociale rationnelle et humaine.

Indéniablement, c’est par la faute de tous les gouvernements que le sang des travailleurs coule à flots, dans tous les pays, depuis plus de trois années. Si, effectivement, ce sont Hitler et Mussolini qui, en dernier lieu . provoquèrent le conflit, il y a d’autres responsables : la finance internationale, les trusts industriels et financiers qui, de 1919 à 1930, financèrent le mouvement fasciste italien et le national-socialisme allemand et, de 1930 à 1939, payèrent la presse des différents pays démocratiques et fascistes, pour faire les campagnes bellicistes qui devaient provoquer un réarmement puissant et sans limite de toutes les nations, qui devait trouver sa conclusion dans la guerre actuelle, en même temps que le conflit enrayait tout mouvement de libération des masses travailleuses.

Le conflit actuel est l’oeuvre des puissances d’argent de chaque nation, puissances qui vivent exclusivement et internationalement de l’exploitation de l’homme par l’homme. Il est aussi le résultat des compétitions internationales, des compromissions et des rivalités politiques des hommes et des systèmes, de la vénalité, de la faiblesse, de l’hypocrisie, de l’inconscience des politiciens du monde entier.

Et nous n’exceptons personne.

La diplomatie secrète a sévi aussi bien à Londres qu’à Berlin, à Paris qu’à Moscou, à Washington aussi bien qu’à Tokio.

Aujourd’hui, les impérialistes d’hier se posent en libérateurs. Les fabricants et les trafiquants du Traité de Versailles, les inventeurs et les torpilleurs de la Société des Nations, les complices d’Hindenburg et de Dollfüs, les étrangleurs de la Révolution espagnole, les fomenteurs des contre-révolutions du Mexique, les fournisseurs de l’Allemagne hitlérienne et de l’Italie mussolinienne prétendent, ô ironie ! mettre de l’ordre dans le Monde, eux qui n’ont jamais vécu que du désordre et de l’incohérence des nations des deux hémisphères.

Que nous propose et le sordide impérialisme anglais et le féroce capitalisme américain ? Tout simplement le retour à « l’avant-guerre », le retour au statut-quo de Versailles ou à quelque chose d’à peu près semblable, et la réinstallation de la Société des Nations, la continuation de l’exploitation du travail par le capital, la banque maîtresse du monde, l’Or-Roi, les mille et une combinaisons diplomatiques, les mille et une combinaisons politiques et financières que nous connaissons. En somme, de quoi re-préparer une bonne petite guerre mondiale dans 25 ou 30 ans, si les Peuples sont incapables d’instituer la véritable Société des Peuples qui garantira la Paix et organisera le monde, par la Révolution sociale universelle.

Que nous proposent, d’autre part, les sinistres apôtres de la « Révolution Nationale » ? Une Révolution à rebours, qui rejetterait l’humanité en arrière vers les époques les plus sombres de son existence, dans l’abîme d’un fanatisme racial et religieux, d’un esclavage total des masses laborieuses et d’un écrasement absolu de l’individu.

Il reste l’U.R.S.S. Mais la République de Staline, si elle a fait disparaître le capital privé, n’a pas fait disparaître les différences de classes (hauts fonctionnaires, hauts militaires, ouvriers privilégiés et, en tout dernier lieu, le peuple). D’autre part, nous lui reprochons d’avoir supprimé toute pratique et toute apparence ou idée de liberté. Hélas ! le Guépéou n’a rien à envier à la Gestapo et, si les camps de concentration de Sibérie renferment des fascistes, ils contiennent aussi des socialistes, des Trotkistes, des syndicalistes et des libertaires. Nous lui reprochons d’avoir aussi, dans cette guerre, joué un jeu diplomatique qui a servi les intentions des fascistes et des impérialistes et permis le déclenchement du terrible conflit actuel.

De tout cela il résulte que les peuples ne peuvent, ni ne doivent plus avoir confiance en personne Les Chefs d’Etat, les chefs militaires de toutes couleurs et de toutes nuances, passent d’un camp dans l’autre, déchirent des traités, en signent d’autres, servent tantôt la République, tantôt la Dictature, collaborent avec ceux à qui ils faisaient hier la guerre, et vice-versa et revice-versa. Tant et si bien que personne ne comprend plus rien à l’honneur, à la foi jurée, à la probité, à l’honnêteté.

Mais si les hommes d’Etats, les généraux, les amiraux et consorts se permettent de jouer « aux petits fous », le peuple, lui, paie les pots cassés : on le mobilise pour les démocraties, contre les démocraties, pour les fascistes, contre les fascistes*

Mais que ce soit en Afrique, en Asie, en Europe, c’est le bon peuple qui fait les frais de ces « expériences contradictoires » et se fait casser la gueule. Ce sont les maisons des gens du peuple qui s’écroulent avec dedans les femmes et les gosses du peuple. Et demain, ce sera encore le peuple qui paiera les frais de reconstruction.

Nous demandons à tous ceux que le parti pris n’aveugle pas d’ouvrir les yeux sur la situation.

Le fascisme germano-italien, conséquence de l’impérialisme mondial est à l’agonie.

L’impérialisme anglo-méricain, aidé de toutes les forces du capitalisme aux abois prépare :

  • 1° Une paix impérialiste, genre Traité de Versailles, qui sera une nouvelle base de conflits futurs et l’espoir de nouveaux bénéfices ;
  • 2° L’étouffement de tout mouvement d’émancipation ouvrière avec le concours des traîtres et arrivistes de tous les pays ;
  • 3° Un règlement de comptes, à l’amiable ou non-avec la Russie soviétique.

Quant à cette dernière, elle rêve d’instaurer de par le monde un capitalisme d’Etat qui, par son despotisme, serait aussi néfaste que le capitalisme privé.

Ainsi sera l’ordre social universel, à moins que les travailleurs du monde entier s’unissent dès maintenant pour planter le drapeau de la Révolution sociale sur le chaos que nous vivons.

Pour cela, que faut-il faire ?

En premier lieu, utiliser la tendance naturelle des Peuples vers l’Unité des Continents ; fédérer les pays qui composent les Continents ; développer entre ces Continents les liens de solidarité qui les associent ; donner à ces liens une forme organique, par l’institution d’une véritable Société des Peuples et non par un replâtrage d’une Société des Nations, qui ne serait qu’une Ligue nouvelle des Nations et de leurs intérêts égoïstes ; faire de cette Société des Peuples, par la création d’organismes à son service, tels qu’un Conseil Economique International et un Conseil Administratif et Social International, le véritable Régulateur Economique, administratif et social du Monde entièrement organisé pour la Paix et contre la guerre.

Mais tout cela ne sera, incontestablement, que l’oeuvre de la Révolution sociale, universelle comme la guerre elle-même.

Et pour cette tache gigantesque, il faut que les peuples s’entendent, s’associent, luttent ; qu’ils comprennent, agissent et réalisent et que, par avance, ils jettent entre eux, par l’organe de leurs prolétariats respectifs, les bases d’un vaste mouvement fédéraliste continental d’abord, universel ensuite ; qu’ils soient prêts à projeter, avec toutes ses conséquences ce mouvement sur le plan des réalités concrètes dans chaque pays, afin que naissent de leurs propres organisations de classe les institutions qui, demain, régiront, dans tous les domaines les Peuples associés.

Nous entendons par Révolution Sociale : l’abolition du pouvoir politique, l’abolition du militarisme, l’abolition de l’Or-Roi, l’abolition des classes.

Nous entendons par Révolution Sociale la liberté entière et définitive de parole, d’organisation, d’action pour tous ; la libre disposition des moyens de production pour tous les Peuples ; le travail, les produits, l’instruction, le bien-être pour tous.

Nous entendons par Révolution Sociale : le pouvoir aux mains de tous, par :

-   L’association syndicale, faisant fonctionner la production dans chaque pays et dans le Monde, assurant une équitable répartition des matières premières et des produits, ainsi que des objets de toute nature nécessaires à la consommation

-   L’association communale, assurant par la distribution, tous les besoins de la consommation et administrant le bien commun dans l’intérêt de tous ; créant, sur le plan social tous les organismes capables sur tous les terrains, d’assurer le plein développement et l’épanouissement des individus ; garantissant à tous la véritable égalité sociale par la bonne administration d’une saine et populaire justice, basée sur la conciliation et l’arbitrage.

-   L’association sur le plan géographique, de façon identique, des localités, régions et pays, par la création d’organismes de liaison permanente des rouages économiques et administratifs pour gérer mieux les intérêts de tous ordres et de tous, harmonieusement conjugués et associés pratiquement.

Pour cela,, il faut non seulement que notre Révolution sociale soit universelle et, autant que possible, simultanée dans tous les pays, mais il faut encore qu’elle ouvre la voie à l’Ere de la Raison, de la Science consciente et du Travail libérée.

Travaillons pour elle. Travaillons bien.

Il ne s’agit pas de lutter seulement contre le fascisme hitlérien, mais contre tous les fascismes, contre toutes les tyrannies,, qu’elles soient de droite, du centre ou de gauche, qu’elles soient encore royales, démocratiques ou sociales, car aucune tyrannie n’émancipera le travail, ne libèrera le monde, n’organisera l’humanité sur des bases vraiment nouvelles.

Il ne s’agit pas de parler de liberté, il s’agit de vivre librement. Il ne s’agit pas de parler de fraternité, il s’agit de vivre fraternellement.

Nous ne luttons pas pour inscrire des mots sur une bannière ou changer de couleur un drapeau.

Nous sommes concrets. Nous voulons passer : de la guerre perpétuelle à la paix perpétuelle ; de l’exploitation de l’homme par l’homme à l’égalité sociale ; de la tyrannie totale ou partielle à la liberté entière ; de l’incohérence à la conscience.

Nous n’acceptons aucun compromis avec personne. Nous ne sommes attachés à aucune personnalité, ni à aucun parti. Nous voulons la réalisation pratique de l’Idée sociale préconisée depuis près de deux cents ans par les républicains, les socialistes, les syndicalistes, les libertaires. Et nous sommes convaincus que, seules, la méthode sus-indiquée pourra la réaliser.

Aujourd’hui, nous sommes une association de lutteurs. Demain nous serons une association de-constructeurs et de réalisateurs.

Et pour mener la tâche à biens :

... Nous cherchons des associés

La F.I.S.R.


CNT-AIT



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