mercredi
13 décembre 2006
Bien qu’on nous rebatte les oreilles avec le discours sur la fameuse "égalité des chances", l’école fait toujours du tri sélectif. Les fils d’ouvriers seront-ouvriers ou employés subalternes, les fils de cadres deviendront cadres, etc., etc.
Des objectifs inavoués, des discours savamment orchestrés
Malgré les lyrisme des divers syndicats enseignants qui fondent leur légitimité morale sur ce discours, les résultats sont à l’évidence toujours les mêmes. La seule revendication qu’ils avancent, celle de "toujours plus de moyens" ne peut pas, à elle seule, contrecarrer l’objectif essentiel de l’institution scolaire, bien souvent inavoué, mais toujours présent : effectuer le tri social en fonction des besoins de l’économie capitaliste (même si ce tri est souvent en retard sur les desiderata des patrons). L’économie est toujours la machine motrice, l’école le wagonnet qui suit ses besoins. Wagonnet dans lequel on doit apprendre tout un panel de connaissances mais surtout apprendre d’abord à accepter "l’échec" ou "la réussite" c’est-à-dire la hiérarchisation précoce des individus, apprendre à accepter l’idée que l’on sera dorénavant évalué de façon quasi-permanente et ce dès l’école maternelle ! C’est accepter que ces évaluations ne concernent pas uniquement les connaissances mais aussi et surtout les comportements, les attitudes des élèves.
Aujourd’hui, plus que jamais, l’école applique des pratiques ultra-autoritaires, ultra-sélectives, ultra-normatives. Les discours des différentes structures syndicales et politiques présentent cette institution comme un lieu où "l’égalité des chances" est toujours possible, si "l’on s’en donne les moyens". "On", c’est l’élève. Comme s’il y pouvait quelque chose, comme si la machine à sélectionner et à écraser lui laissait un choix réel. Ces discours ne tiennent pas la route (il suffit d’observer ce qui se passe sur le terrain scolaire pour s’en rendre compte) mais ils contribuent à faciliter l’application sans faille des textes qui ont foisonné ces temps derniers (par exemple, l’invention d’une "note de vie scolaire" permettant de fliquer encore plus les élèves). Bref, derrière les beaux discours, c’est tolérance zéro, sélection 100 %
L’intégration des handicapés, un exemple parmi d’autres
L’intégration graduelle et programmée de tous les enfants handicapés dans le système scolaire "normal" est présenté, une fois encore, comme une bataille pour l’égalité. Certes, ce n’est pas nous qui défendrions la mise à l’écart des handicapés. Mais, ici aussi, derrière le discours lénifiant, ce qui se cache, ce sont essentiellement des mesures financières. Loin d’être mus par un bel élan de solidarité, les pouvoirs publics le sont surtout par les économies qu’ils peuvent réaliser en fermant les institutions spécialisées qui, avec des personnels très compétents coûtent beaucoup plus cher qu’un simple instituteur, qui a déjà 25 à 30 élèves auxquels on ajoute maintenant un ou deux enfants handicapés, tout cela avec des mesures d’accompagnement ridicules, quand elles ne sont pas carrément absentes. Le discours sur "ces enfants qui sont comme les autres" est négateur de la différence, des spécificités individuelles. Tant pis si l’enfant se retrouve en souffrance physique ou morale. L’hypothèse n’a même pas été envisagée ! Au lieu de le soutenir comme il le faudrait, faute de temps spécifique, l’enseignant doit se contenter de ... le noter. Au mieux il pourra s’appuyer pendant quelques heures sur la présence d’un AVS (auxiliaire de vie scolaire). Quant aux conséquences du handicap sur les capacités d’apprentissage elles passent à la trappe [1].
Que faire ?
Alors, que faire dans ce contexte déplorable, dans lequel les écoles sont classées par l’administration selon de critère aussi barbare que ridicule de "école en zone violence" et "école non en zone violence" -alors que les écoles ghettoisées dans leur quartier ne sont que le reflet de choix politico-économiques faits en haut lieu, alors que les principaux syndicats "dénoncent" médiatiquement mais appliquent scrupuleusement des pratiques négationnistes de l’enfance.
Que reste-t-il aux enseignants de bonne volonté comme moyen d’action ? Que reste-t-il à ceux qui ne veulent pas courber l’échine ? Il reste de nombreuses pistes à explorer individuellement et collectivement. Et à titre d’exemples : refuser l’inspection-notation des enseignants (car nous nous moquons des promotions individuelles), ne pas appliquer les textes de normalisation, de répression, de contrôle social, refuser les évaluations étatiques, ne pas pratiquer la hiérarchisation des élèves dans les classes, défendre l’individualité de chaque élève (handicapé ou pas) face à la machine à laminer, dialoguer avec les parents, les collègues, avec tous ceux qui désirent agir directement sur le terrain, sans intermédiaire, s’associer et pourquoi pas, se syndiquer dans une structure, la CNT-AIT, qui s’inscrit dans l’action directe et la résistance à l’oppression.
Pour une école anti-autoritaire et anti-sélective. Des enseignants en lutte.
Tiré du Combat Syndicaliste numéro 97 de la CNT-AIT de Midi- Pyrénées.
[1] Un exemple parmi mille autres : des handicaps sensoriels ou moteurs peuvent entraîner des distorsions dans la perception de l’espace et, de ce fait, ils ont des répercussions sur l’apprentissage de la géométrie. Là où il avait autrefois un psychopédagogue pour l’aider à franchir cette difficulté, l’enfant handicapé se contentera maintenant d’un AVS, généralement une mère de famille du voisinage, qui n’a absolument aucune compétence dans ces domaines.
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