mardi
17 septembre 2002
Placés sous le feu de l’actualité,la Confédération Paysanne et l’un de ses responsables José Bové ont occupé la une des journaux pendant presque une semaine ; les déclarations navrantes de ce dernier à sa sortie de prison (appel à la constitution d’un front unique contre la mondialisation au-delà de tous les clivages politiques, appel à rencontrer Jospin et Chirac, présence à la fête des Stals du père Hue-bu, ...) devraient suffire à refroidir les sympathies que ce mouvement avait fait naitre chez certains de nos compagnons.
Bien sûr, il ne faut jamais confondre un mouvement et son leader maximo ; cependant pour couper court aux diagnostics genre "médiaitie aiguë ayant entraînée une bouffée de mégalomanie suite à d’intense pressions récupératrices", je prétends que ce mouvement n’a jamais été autre chose que ce qu’il paraît être aujourd’hui : fortement désireux d’être reconnu par les pouvoirs publics, fortement désireux de sortir de l’ombre que lui fait la FNSEA (on est en plein remake de la CFDT contre la CGT des années 1970).
Eleveur depuis une vingtaine d’années dans le Lot, j’ai lu leur presse (le mensuel "Campagnes solidaires"), j’ai fréquenté leurs militants. Je n’ai plus aucune illusion sur leur radicalité et je me propose de tenter de dissiper les derniers doutes ...
1) LES ORIGINES DU MOUVEMENT, LE PERE FONDATEUR, LES TENDANCES
Le leeader charismatique des Travailleurs Paysans des années 60-70 s’appellait Bernard Lambert, un ancien de la JAC (Jeunesse Agricole Catholique), ancien député MRP, il deviendra membre du bureau national du PSU dans les années 70. La Confédération Paysanne est issue de ce mouvement et regroupe en son sein, comme il y a trente ans le PSU, des gens d’horizons divers : des espèces de chrétiens de gauche (Mouvement de la jeunesse rurale et catholique - eau bénite à tous les étages - des pages de Campagnes Solidaires leur sont consacrées de temps en temps), des proches du Parti Socialiste, des proches des Verts, des sympathisants trotskistes et, comme partout peut être, des gens sincères qu’on abuse, et aussi des gens qui auraient été, il y a très longtemps, des "libertaires", voir des situ, mais qui ont bien changé.
2) ACTION FAUSSEMENT DIRECTES MAIS REELLEMENT MEDIATIQUES
Intelligement utilisés, les anciens du Larzac ou de Nanterre vont assurer le côté faussement "action directe", auréolés de leur prestige d’anciens radicaux.
Quelques exemples :
A Toulouse, aux grands moments de l’épisode "vache folle", des militants de la Confédération Paysanne investissent les locaux des Douanes. (objectif : recherche d’une disquette sur les farines animales). FR3 était là, SUD aussi.
Lors de très nombreuses opérations de déchargement sauvage de camions transportant de la viande ovine néerlandaise, présence de la presse et de flicaille relativement bienveillante.
Démontage du Mac Do de Millau en présence de la Dépêche [et après négociation avec les RG et la gendarmerie].
A ma connaissance, pratiquement toutes les actions d’éclat de la Confédération Paysanne ont toujours été médiatisées. En cela, la CP reste dans la tradition du mouvement paysan qui ne peut exercer en pratique le droit de grève et qui doit donc trouver d’autres moyens d’actions, souvent à la limite de la légalité. Ces actions illégales sont simplement menées avec plus d’intelligence et de discernement, les cibles plus judicieusement choisies qu’à la FNSEA. L’action musclée vient simplement appuyer une même stratégie réformiste.
3) LA SEDUCTION
La séduction qu’exerce la CP sur nombre de compagnons s’explique en partie par la méconnaissance qu’ils ont de l’autre face de ce syndicat : "Robin des bois casse tout" mais, dans le même temps, il s’apprête à négocier à la table des grands (négociation de Seattle) ; mais dans le même temps, il est prêt à jouer les intérêts français contre les capitalistes américains (pour es léninistes, ça s’appelle "jouer des contradictions internes au capitalisme").
4) LA CP VEUT DES SIEGES
Aux dernières élections professionnelles de 1995, la CP obtient 19% des voix au plan national. Elle s’efforce de siéger dans toutes les commissions possibles et imaginables pour, bien sûr, y défendre la cause sacrée des petits et de l’agriculture propre.
En Loire Atlantique (fief historique des Travailleurs Paysans), la Confédération Paysanne sort victorieuse des élections de 1995 (seul départment où elle soit majoritaire). Elle s’empresse de tendre la main au syndicat FNSEA, pourtant honnie et villipendé, pour un cogestion de la chambre d’agriculture. Toujours le souci du vaste consensus sans doute ?
Pour l’horizon 2001, les grandes manoeuvres éléctorales professionnnelles ont commencé, la CP a bien l’intention de se placer. Actuellement, elle dispose déjà de permanents, qualifiés d’animateurs (en fait des emplois-jeunes). Dans une petite ville comme Figeac (9 000 habitants) la CP dispose d’un local et d’une "animatrice" ...
5) QUE BENE AMAT, BENE CASTIGAT
En bon français, cette phrase d’occitan veut dire : Qui aime bien châtie bien. La gauche plurielle aime bien la CP. Bien sûr, il faut que force reste à la loi. C’est pourquoi tonton Jospin à tapé sur les doigts du vilain petit Robin des bois. Mais pas trop quand même. Les industriels de Roquefort ont participé au règlement de la caution. Souvenons nous du motif numéro 1 du démontage du Mac Do de Millau : contre la taxation des produits français aux States.
La CP et ses gens sont persuadés que ce système est aménageable et réformable, que l’on peut utilement contrer le système de l’intérieur, que l’on peut apparaître impunément dans le ballet médiatique sans être immédiatement happé. Un certain nombre de leurs militants est impliqué dans la gestion communale : conseillers municipaux, maires adjoints, ... Quand ils sortent de prison, des conseillers généraux socialistes viennent à leur rencontre avec des sandwiches qu’ils partagent avec les matons. Ils s’accomoderaient bien d’un monde où la marchandise et les légumes seraient propres, le commerce équitable.
Nous n’avons rien à attendre d’eux
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