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TERRORISME D’ETAT

jeudi 22 avril 2004

Rien ne distingue un Hutu d’un Tutsi. Ils vivent dans les mêmes zones géographiques, ont la même langue, la même religion, la même culture. Pourtant, dès 1964, le Président de la République du Rwanda, Kayibanda, appelait à préparer "la fin totale et précipitée de la race tutsi". Le racisme ne se nourrit pas de "différences" mais de sa propre monstruosité. Le 6 avril 1994 son successeur, Habyarimana, est abattu dans son avion personnel. Quelques minutes plus tard commence le génocide. Un massacre planifié, organisé, partant du sommet de l’État et descendant en cascade jusqu’à la moindre commune, mené sous la houlette des élites du pays -du ministre à l’instituteur de village.Le génocide des Tutsis du Rwanda sera pratiquement total. Bien rares sont ceux qui ont pu y échapper. Les autres, plus d’un million de personnes -du nourrisson au vieillard- ont été torturés, violées, découpées à la machette. Moins de trois mois ont suffi à les exterminer.

Du début à la fin, les génocidaires rwandais ont pu compter sur deux soutiens essentiels : la République Française et le Vatican.

Ni l’un ni l’autre n’ignoraient quoi que ce soit : ni les préparatifs, ni le déroulement des opérations. Grâce aux subventions françaises, l’armée Hutu était passée entre 1990 à 1994 de 5 300 soldats à plus de 40 000, tandis que les milices du MRND, qui constitueront les plus terribles massacreurs, étaient "formées" par des militaires français. En 1992, des subventions françaises et des prêts garantis par le Crédit Lyonnais permettaient aux autorités Hutu d’acheter pour environ 35 millions de francs d’armes aux égyptiens. De janvier 1993 à mars 1994, quelques 581 000 machettes destiner à "équiper" un tiers des adultes Tutsis sont achetées.Pendant les massacres et après, la grande masse des journalistes, historiens, sociologues, et autres intellectuels français n’a rien trouvé à redire, quoique certains aient trouvé là matière à faire de la poésie en évoquant des "massacres grandioses dans des paysages sublimes" (Jean d’Ormesson, de l’Académie française, Le Figaro, juillet 94), tandis que d’autres (par exemple, Jean-Marie Colombani, Le Monde, 18 juin 94) avaient précédemment repris une part de l’argumentaire Hutu, en l’occurrence une pseudo exclusion des "intellectuels Hutu". Les politiciens ont été encore plus silencieux. Ils partageaient certainement l’analyse de notre Président de la République, François Mitterrand : "Dans ces pays-là, un génocide c’est pas trop important".

Quand à l’église catholique, c’est depuis cinquante ans qu’elle soutient l’ethnicisation du conflit. Elle loue les Hutu pour leur "foi catholique sincère et pure". Elle continue à soutenir les prêtres compromis dans le génocide -dont certains ont massacré leurs propres fidèles Tutsis.

Nous avons tiré les informations ci-dessus d’un ouvrage de Jean-Paul Gouteux, dont nous pouvons faire nôtre une des conclusions qu’il tire de ce massacre : "Croire que l’État représente le bien public par définition, par vertu intrinsèque, est une des croyances à la fois la plus folle, la moins étayée par la réalité ... L’identification de l’État au bien public est en grande partie aussi illusoire que la réalité de la démocratie".

( Références : J.P. Gouteux, "Un génocide sans importance", éditions Tahin party ; "La nuit rwandaise”, éditions Dagorno.)

CNT-AIT


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